Revue des marchés du 4e trimestre 2024

COMMENTAIRE ÉCONOMIQUE

Les marchés boursiers ont été plutôt erratiques au quatrième trimestre. Tout a commencé par l'inquiétude entourant l'ampleur des mesures budgétaires que Beijing révélerait à la suite des mesures monétaires déjà annoncées à la fin de septembre. Les marchés ont d'abord reculé lorsqu'il est devenu évident que la Chine allait attendre après les élections présidentielles américaines avant de fournir plus de clarté[1]. En parlant des élections présidentielles américaines, la réaction initiale des marchés à son résultat a été plutôt positive, probablement plus parce que la victoire de Trump a été sans équivoque que le fait que Trump a gagné. C’est que les marchés financiers ont tendance à ne pas aimer l'incertitude et une victoire nette, plus que qui a gagné, était préférable que d'avoir une contestation prolongée. Bien sûr, il y a lieu de s'inquiéter du 2e mandat de Trump, mais pour le moment, les acteurs du marché choisissent de penser que les impacts positifs de ses réductions d'impôts et de ses efforts de déréglementation l'emportent sur les impacts négatifs de ses politiques en matière de commerce international et d'immigration. Dans ce contexte, l'indice MSCI All Country World[2], l'indice S&P 500 et l'indice composé S&P/TSX ont progressé de 1,93 %, 2,31 % et 3,76 %, respectivement, au cours du trimestre.

Les marchés des titres à revenu fixe ont été neutres ou en légère baisse au cours du 4e trimestre, selon le segment. Cela en a surpris certains, car les banques centrales un peu partout ont continué de réduire leur taux directeur. Cela dit, ce qui s'est passé, c'est que même si les taux à très court terme ont subi des pressions à la baisse en raison des mesures prises par les banques centrales, les taux des instruments à long terme ont augmenté de façon régulière au cours du trimestre. Par exemple, alors que l’effective federal funds rate (« EFFR », taux effectif des fonds fédéraux) est passé de 5,33 % à la mi-septembre – lorsque la Réserve fédérale a abaissé le taux de 0,50 % - à 4,33 % à la fin du trimestre, le taux des Treasury Notes (billets de trésorerie) américaines à 2 ans a quant à lui passé de 3,50 % à 4,25 % et de 3,60 % à 4,50 % ou à peu près pour les Treasury Notes à 10 ans. Il s'agit de mouvements importants et, par conséquent, le rendement sur les coupons n'a pas compensé la perte en capital pour la plupart des segments du marché des titres à revenu fixe. Ainsi, tandis que l'indice ICE BofA Canada Broad Market a contenu ses pertes à seulement -0,10 %, l'indice ICE Bank of America Global Government Bond et l'indice ICE Bank of America Global Corporate ont cédé -2,06 % et -1,32 %, respectivement. Je crois que l'évolution des taux, du moins aux États-Unis, est en partie attribuable à la crainte que les droits de douane à l'importation n'entraînent une augmentation temporaire de l'inflation[3] et à la crainte que les dépenses publiques ne deviennent incontrôlables.

TRUMP 2.0 SIGNALE-T-IL LA FIN DE L'EXCEPTIONNALISME AMÉRICAIN ?

La réponse rapide c'est… probablement pas, du moins à court terme. Cela donnerait plus de crédit à Trump qu’à tout autre président sortant. De plus, si le rythme effréné auquel les décrets ont été publiés depuis son investiture a tenu tout le monde sur leurs talons, je m’attends à ce que Trump s’essouffle rapidement. En fait, je m'attends à ce que, tout comme il l'a fait au cours de son premier mandat, Trump atteigne rapidement un point de lassitude politique et commence à passer une plus grande partie de son temps sur son terrain de golf personnel à Mar-a-Lago, surtout lorsqu’il se rendra compte qu'il ne peut pas simultanément faire monter le marché boursier, rééquilibrer le déficit commercial, faire baisser le dollar ainsi que les taux d’intérêt. À ce sujet, l’article le plus pertinent que j’ai lu a été écrit par Olivier Blanchard[4]. Dans son article du 13 novembre[5], le professeur Blanchard soutient que, bien que les droits de douane puissent initialement apporter à Trump, ce qu'il souhaite (augmentation des revenus et réduction du déficit commercial), cela ne sera que de courte durée. En effet, même si la Chine et l'Europe n'imposent pas de tarifs en retour, si la demande américaine se détourne de sources d’approvisionnement étrangères vers des sources domestiques alors que l'économie nationale est proche du plein emploi, cela ne manquera pas d'exercer une pression à la hausse sur les prix. Cela pourrait également amener la Réserve fédérale à relever les taux d'intérêt, ce qui, combiné à une amélioration de la balance commerciale, entraînerait une hausse du dollar américain. Et nous savons que Trump ne veut ni des taux d'intérêt plus élevés ni un dollar plus élevé. Selon le professeur Blanchard, la situation serait encore pire si la Chine et l'Europe imposaient des tarifs réciproques, car les exportateurs américains en subiraient les conséquences, ce qui pourrait laisser la balance commerciale inchangée en plus d’avoir plus d’inflation et des taux d'intérêt plus élevés de toute façon. À la suite de cela, il n'est pas clair si Trump doublerait les droits de douane, tenterait de saper l'indépendance de la Réserve fédérale ou accuserait la Banque Populaire de Chine (People's Bank of China « BPoC ») et la Banque centrale européenne (« BCE ») d'être des « manipulateurs de devises », mais de toute façon, je soupçonne que les impacts de ses politiques commerciales s'estomperont avant les mi-mandats de 2026 et que la prochaine administration, républicaine ou non, abrogera la plupart d'entre elles. Il s'agit donc surtout d’un problème à court terme.

Il en va de même pour les politiques d'expulsion de Trump que Blanchard considère comme irréalistes. Le fait est que la main-d'œuvre américaine est composée d'environ 160 millions de travailleurs. Si Trump atteint son objectif d'expulser 1 million d’individus par an pendant 10 ans, les États-Unis perdraient près de 5 % de leur main-d'œuvre, dont une partie importante est présente dans les secteurs de l'agriculture, de la construction et des services de vente au détail. Naturellement, le rapport entre les postes vacants et le nombre de chômeurs monterait en flèche. À partir de là, il est difficile de ne pas voir que cela conduirait à des pressions inflationnistes soutenues. Blanchard conclut en disant que pour cette raison, le nombre d'expulsions finira par être plus symbolique.

En ce qui concerne la fiscalité, Blanchard estime que l'extension des réductions d'impôt promulguées en 2017 est très probable, mais que des mesures supplémentaires visant à réduire le taux d'imposition des sociétés pour les entreprises manufacturières et d'exonérer d’impôts les prestations de sécurité sociale seraient probablement contestées par un congrès contrôlé par le parti républicain. Néanmoins, ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que le déficit budgétaire américain se situe actuellement à 6,5 % par an. Cela augmenterait de 1 % à 2 % par an selon le Congressional Budget Office si Trump obtient ce qu'il veut avec ses propositions les plus drastiques. Nous devons nous demander combien de temps faut-il pour que les investisseurs obligataires mettent le gouvernement en garde...

Fondamentalement, à court terme, il semble que la voie de la moindre résistance en réponse aux politiques de Trump soit que les marchés boursiers s’enflamment, que les taux d'intérêt augmentent et que le dollar américain augmente, ce qui est exactement ce qui s'est produit. La question est donc de savoir dans quelle mesure le ‘facteur Trump’ a déjà été incorporé dans les valeurs des différentes catégories d'actifs.

C'est à long terme que les choses se compliquent. Le système institutionnel américain a survécu au premier mandat de Trump grâce à ses freins et ses contrepoids. Il reste sur ses pieds, bien que meurtri. Par ailleurs, le pouvoir judiciaire, l'armée, un écosystème médiatique indépendant vivant et, plus important encore, une économie ouverte et des marchés de capitaux vigilants ont été de formidables remparts contre les pires impulsions de Trump. Cela étant dit, cette fois-ci, Trump arrive à la Maison-Blanche avec une cohorte de personnes nommées qui lui sont plus dévouées qu'auparavant dans sa croisade contre « l'État profond ». À cet effet, depuis novembre, Trump a déjà lancé des attaques contre l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (Environmental Protection Agency « EPA »), la Federal Emergency Management Agency (« FEMA »), l'Internal Revenue Service (« IRS »), le Federal Bureau of Investigations (« FBI »), la Central Intelligence Agency (« CIA ») et cherche à contraindre la Réserve fédérale à se plier à ses désirs. Le danger avec cela, comme l'a laissé entendre le groupe de réflexion politique Eurasia Group dans son rapport annuel Top risk est que :

« ... l'érosion des contrôles indépendants sur le pouvoir exécutif et l'État de droit augmentera la mesure dans laquelle le paysage politique américain dépend des décisions d'un homme puissant à Washington plutôt que de principes juridiques établis et politiquement impartiaux. Les fusions entre entreprises que Trump perçoit comme antagonistes feront l'objet d'un examen réglementaire plus approfondi... Si Trump récompense systématiquement les personnalités du monde des affaires politiquement alignées avec un traitement préférentiel sur les questions réglementaires, juridiques et contractuelles - entre autres choses - il permettra un système où la proximité du pouvoir, et non la concurrence sur le marché, détermine le succès ... Cela amplifiera le capitalisme de copinage dans la plus grande économie du monde, avec des risques pour les entreprises qui doivent consacrer plus de temps et d'argent à cultiver des relations transactionnelles avec l'appareil politique de Trump qu'à créer de la valeur économique... Cette descente dans une oligarchie capitaliste de facto se répercutera partout. Cela pourrait déprimer le désir d’innovation et la productivité économique, car le gouvernement américain récompensera les entreprises les plus politiquement connectées (et punira implicitement ou explicitement les autres) plutôt que les plus compétitives. La corruption prospérera. À long terme, les États-Unis deviendraient un environnement d'affaires et d'investissement moins attrayant, et les Américains verraient leur niveau de vie stagner.[6] »

Ce n'est pas le genre de choses qui se développe du jour au lendemain, mais il vaut la peine de réfléchir à la façon dont une prime de risque pourrait émerger sur les marchés des États-Unis alors que nous réfléchissons aux photos montrant les titans de la technologie de la Silicon Valley déambulant dans la rotonde du Capitole américain ...

GARDEZ ÇA SIMPLE ET STUPIDE

La finance 101 nous enseigne que l'une des seules choses gratuites sur les marchés des capitaux est la diversification. L'idée est que si l'on détient de nombreux investissements distincts, si un ou plusieurs d’entre eux perdent de la valeur, d'autres peuvent s’apprécier et ainsi atténuer la perte dans certaines conditions du marché. De cette façon, la diversification peut aider à maintenir l'équilibre d'un portefeuille tout en conservant la possibilité de générer des rendements positifs. Naturellement, un portefeuille diversifié, même dans les meilleurs cas, peut ne pas produire de rendements comparables à ceux des portefeuilles d'actifs individuels. Un portefeuille diversifié peut toutefois aider à réduire le risque de subir des pertes importantes pendant les périodes de volatilité extrême. L’ennui est que, bien que ce concept ait fonctionné pendant cinquante ans après la publication de sa preuve mathématique[7], depuis 2015, un portefeuille passif composé exclusivement d'un fonds négocié en bourse (« FNB ») du S&P 500 a donné les meilleurs résultats de manière assez récurrente.

C'est peut-être la façon des marchés financiers de dire aux investisseurs de garder ça simple et stupide[8], en contradiction avec l'un des principes fondamentaux de la théorie moderne de l'investissement. Ce phénomène a incité les investisseurs à transférer un pourcentage croissant de leur portefeuille en actions américaines et à en consacrer une part croissante dans des véhicules indiciels. En fait, les FNB de BlackRock et de Vanguard sont des stratégies qui ont connu le plus de souscriptions nettes en 2024[9]. Cela nous amène à un point où, selon la plus récente enquête mondiale sur les gestionnaires de fonds de la Bank of America, le pourcentage de gestionnaires de fonds indiquant qu'ils surpondèrent les actions américaines était à son plus haut niveau en 20 ans et que le thème « Magnificent 7 », qui avait été le thème le plus partagé depuis 21 mois consécutifs, devenait encore plus partagé au sein de la communauté[10].

Les sonnettes d'alarme retentissent depuis au moins quatre ans déjà, mais en vain. À ce stade, le multiple des bénéfices du S&P 500 n'a pas cessé d’augmenter qu'en termes absolus (par rapport à l'histoire) et en termes relatifs (par rapport aux indices d'autres pays). Est-ce justifié ? Eh bien, les bénéfices historiques et espérés dans le futur expliquent toujours une grande partie de l’histoire et il se trouve que la croissance des bénéfices de S&P a dépassé les estimations consensuelles chaque trimestre depuis le T4-2022, sauf un,[11] et ils devraient croître d'environ 14 % en 2025[12]. Ce sont de meilleurs chiffres que ce qui a été projeté pour la plupart des autres grands pays. Donc, de ce point de vue, il y a des raisons d'être optimiste à propos des actions américaines. En outre, nous devons reconnaître que les entreprises américaines bénéficient d'un régime fiscal plus favorable, d'un meilleur cadre de politique industrielle, de coûts en énergie et matériaux de base inférieurs et de lois moins strictes en matière de protection de l'environnement. La mesure dans laquelle ces éléments ont déjà été pris en compte est plus ou moins discutable. Malgré tout, notre préoccupation réside dans le fait que les dix plus grandes sociétés du S&P 500 représentent maintenant environ un tiers de l’indice global et devraient contribuer à environ la moitié de la croissance des bénéfices au cours des 24 prochains mois[13]. Certes, ces dix entreprises ont tenu leurs promesses dans le passé et elles sont devenues gigantesques précisément en raison de leur dynamisme et de la croissance spectaculaire de leurs bénéfices[14]. Cela étant dit, nous croyons que l'une des hypothèses indirectes et plutôt risquées que les investisseurs font à leur sujet en ce moment est de supposer que leur domination sera permanente. C'est une hypothèse majeure, car, si l'histoire peut servir de référence, le marché boursier américain a pourtant sous-performé les marchés boursiers mondiaux au cours de 6 des 11 dernières décennies et Microsoft est le seul titre parmi le top 10 qui était aussi un top 10 au tournant du siècle[15]. Donc, les choses ont tendance à changer plutôt qu’à perpétuer.

La discussion ci-dessus est importante dans le débat de la gestion active par rapport à la gestion passive, car il n'est pas inhabituel pour les gestionnaires actifs de détenir des positions sous-pondérées dans les plus grandes composantes de l'indice et, inversement, de détenir des positions surpondérées dans des titres plus petits ou même dans des titres exclus des indices. C'est l'une des raisons pour lesquelles les dernières années ont été difficiles pour les gestionnaires actifs d'actions. Comme S&P Global en a traité dans sa plus récente mise à jour SPIVA™ :

« ... C’est... plus susceptible d’avoir des conséquences significatives lorsque ces titres ont eux-mêmes un poids global plus élevé et lorsqu'ils ont un rendement sensiblement différent par rapport au reste de l'indice de référence, comme cela a été le cas récemment. Mais étant donné que la concentration du marché augmente lorsque les titres les plus importantes surperforment (et que leur pondération augmente) et que la concentration diminue lorsque les titres de moindre importance surperforment les plus importants, l'évolution de la concentration du marché offre une perspective puissante sur les opportunités relatives qui se présentent au gestionnaire actif typique dans un environnement donné[16].

L'une des conclusions que nous pouvons tirer de ce qui précède est que, puisque la concentration des marchés boursiers a atteint des niveaux historiques records, si un renversement venait à se produire et que les titres les plus importants glissaient, les stratégies d'investissement passives pourraient être touchées de manière disproportionnée. Cela pourrait se produire si Nvidia ne respectait pas les estimations de bénéfices ou réduisait les prévisions de revenus ou si l'un de ses clients hyperscaler[17] réduisait ses dépenses en capital en raison de l'érosion des marges.

Nous nous trompons sur ce point depuis au moins deux ans. Défendre la diversification lorsque la simplicité est ce qui fut récompensé a été coûteux. De plus, il n'y a présentement aucun catalyseur à l’horizon pour justifier une redistribution d’actifs hors des États-Unis vers le reste du monde, à l'exception de l'escompte dans les valeurs qui approche les 3 écarts-types[18]. Néanmoins, je pense que je dois persister dans cette voie parce que c’est lorsque les gens supposent qu'une tendance ne peut que s'améliorer que les dommages causés par de mauvaises surprises sont parfois graves. Je comprends que cela sonne comme une évidence, mais je suppose qu’on ne peut jamais avoir autant tort qu’immédiatement avant de commencer à avoir raison!

En résumé, le message est le suivant : la diversification ne coûte pas cher. C'est la chose simple à faire. Bien sûr, il y a de fortes chances que vous sous-performiez si les titres de grande capitalisation qui ont le mieux performé récemment sont les mêmes qui font le mieux à l'avenir. Cependant, il y a de fortes chances que vous fassiez mieux si le momentum positif qui les habite se dissipe et se déplace vers autre chose.

CALIBRATION DE PORTEFEUILLE POUR 2025

« As-tu eu plus de succès avec tes prévisions sur les marchés financiers l'an dernier qu’avec les résultats de l'élection présidentielle américaine ou les champions de la Coupe Stanley ? » a demandé ma compagne, à moitié intéressée, avec un sourire effronté.

« À peine », ai-je répondu.

La vérité est que si je me réfère à notre lettre du quatrième trimestre de 2023 publiée le 19 janvier de l'année dernière[19], je ne m'attendais pas à ce que les marchés boursiers progressent autant qu'ils l'ont fait et je ne m'attendais pas à ce que les grandes capitalisations américaines tirent les marchés de manière aussi décisive pour une deuxième année consécutive. À ma défense, peu l’avait anticipé. Néanmoins, le groupe de gestionnaires de fonds externes à qui nous confions la gestion des portefeuilles d'actions mondiales de nos clients n’ont cédé que 1 % ou 2 % à leur indice de référence l’an dernier, selon la composition de leur portefeuille. Et si on considère les quatre dernières années, la plupart d'entre eux restent en avance sur leur indice de référence représentatif.

Mes prévisions pour les titres à revenu fixe étaient un peu meilleures, mais je n'ai aucun mérite, car la baisse des taux à court terme qui a eu lieu était conforme aux attentes du consensus de début d'année. J'ai eu raison de mettre en garde contre l'ajout d'obligations à long terme puisque la structure à terme des taux d'intérêt est devenue plus pentue, mais j'ai eu tort de mettre en garde contre les titres plus spéculatifs, car ce segment a continué de surperformer même si les taux de défaut des entreprises a augmenté modestement. Par ailleurs, aucun des scénarios géopolitiques qui auraient pu contribuer à faire dérailler les marchés de leur trajectoire ne s'est produit. Juste pour être clair, je me suis trompé sur le résultat de l'élection présidentielle américaine et je ne pensais pas que les Panthers de la Floride dépasseraient la finale de la Conférence de l'Est. Donc, j'encourage tout le monde à prendre ce qui suit avec un grain de sel.

Alors, qu'est-ce qui nous attend pour 2025 ? Tout d'abord, Wall Street s'attend à ce que le S&P 500 atteigne 6614 d'ici la fin de 2025[20]. Cela représente une appréciation d'environ 12,5 % par rapport au cours de clôture de l'indice à la fin de 2024. Ajoutez à cela un peu plus de 1,5 % des dividendes réinvestis et de l'effet de rachat d'actions et nous obtenons un rendement total de 14 % pour l'indice principal américain, ce qui correspond plus ou moins à la croissance attendue des bénéfices, qui ont été gonflés pour refléter la perception de l’effet net positif des politiques de Trump sur les bénéfices des entreprises. Le multiple des bénéfices du S&P 500 devrait donc rester stable dans la fourchette de 22x à 24x. Mon point de vue de base n'est pas loin de ce consensus. Je crois, cependant, que le consensus repose sur le fait que la Chine mettra en œuvre un plan de relance massif – ce qui se produira, ne serait-ce que pour atténuer l'impact des droits de douane imposés par les États-Unis – et sur le fait que les investisseurs auront raison dans leur évaluation actuelle que Trump v2.0 ne causera pas trop de dégâts et que les banques centrales du monde entier n'auront pas à recourir à des baisses de taux massives pour contrer une récession. Jusqu'à présent, il semble que le scénario de base en ce qui a trait aux tarifs douaniers soit déjà pris en compte, mais un scénario en vertu duquel Trump décide de s'en prendre à la Chine indirectement via le Mexique, la Malaisie ou le Vietnam ne l'est pas. Cela m'amène à croire que les chances d'une surprise négative sont plus grandes que les chances d'une surprise positive par rapport au scénario de base.

En ce qui concerne les titres à revenu fixe, le consensus prévoit actuellement deux baisses de taux au Canada et une à deux baisses de taux aux États-Unis en 2025. Cela se traduirait par des rendements totaux de 5 % à 10 % pour 2025 en fonction du segment de marché et des échéances. Je pense que le consensus est conforme aux trajectoires projetées de croissance et d'inflation. Je soupçonne, cependant, que ces prévisions sont un à tweet présidentiel près de dérailler plus haut ou plus bas. En conséquence, ma conviction est plutôt faible. Un domaine de préoccupation qui, à mon avis, ne reçoit pas suffisamment d'attention est que le département du Trésor des États-Unis devra refinancer plus de 7 trillions de dollars de dette en 2025, dont la moitié au cours du premier trimestre. Malheureusement, ce n'est pas quelque chose que l'homme à la Maison-Blanche peut simplement souffler de son chemin. Pour cette raison, je crois que le segment le plus important et le plus liquide du marché des titres à revenu fixe pourrait devenir vulnérable et que les rendements à terme des bons du Trésor à long terme aux États-Unis pourraient passer au-dessus du seuil psychologique redouté de 5 %. C'est la raison pour laquelle nous hésitons à augmenter la pondération aux bons du Trésor américain à long terme malgré le fait que le rendement à terme est supérieur au rendement à l'échéance des obligations à court terme et demeure nettement supérieur aux rendements des obligations canadiennes à long terme. Parce que je m'inquiète des obligations du Trésor à long terme, j'ai des raisons de m'inquiéter également des obligations corporatives spéculatives. Certes, le rendement total attendu est attrayant par rapport aux obligations corporatives de grande qualité et des bons du Trésor. De plus, les marges du BAIIA (bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements) sont saines, les ratios de levier sont raisonnables et le montant de la dette spéculative arrivant à échéance au cours des 18 prochains mois semble contenu. Le problème, c'est que par rapport aux niveaux historiques, les écarts de rendement élevés sont essentiellement à des seuils records. Selon moi, c'est un signe inquiétant, car il présente des similitudes avec l'environnement de marché des obligations spéculatives vers la fin de 2007. Pour cette raison, nous ne poussons pas l’enveloppe pour tenter de gagner 0,50 % de plus sur les titres à revenu fixe en nous concentrant dans le segment de marché le plus spéculatif. Il y aura certainement un meilleur point d'entrée

Dimitri Douaire, M. Sc., CFA
Chef des placements


[1] Pékin a finalement annoncé une série de mesures à partir du 8 novembre, en commençant par un ensemble de dettes de 10 000 milliards de yuans pour soulager les tensions du gouvernement local.

[2] Rendements en devise locale, sauf indication contraire

[3] Le taux d'inflation de rentabilité sur les horizons de 2 ans et de 5 ans a augmenté d'environ 0,3 % au cours du trimestre, conformément aux scénarios tarifaires qui ont été lancés par une source proche de Trump et de ses principaux conseillers économiques.

[4] Olivier Blanchard est senior fellow et ancien C. Fred Bergsten Senior Fellow au Peterson Institute for International Economics. Il est professeur émérite d'économie Robert M. Solow au Massachusetts Institute of Technology (MIT).

[5] Blanchard, Olivier. « How will Trumponomics work out? », Peterson Institute for International Economics, RealTime Economics, November 13, 2024. How will Trumponomics work out? | PIIE

[6] Eurasia Group, Top Risks 2025, Ian Bremmer & Cliff Kupchan. Traduction libre.

[7] Sharpe, William F. (1963). « A Simplified Model for Portfolio Analysis ». Sciences de la gestion. 9 (2): 277–93

[8] Expression populaire attribuée à un ingénieur principal pour un entrepreneur de la marine américaine en référence à un élément de conception essentiel pour les systèmes qui devaient être entretenus et réparés sur le terrain par toute personne ayant les outils les plus élémentaires disponibles.

[9] Source : Bloomberg.

[10] BofA Global FMS, décembre 2024.

[11] Source : Factset

[12] Idem.

[13] Idem.

[14] L'indice de rendement total net S&P 500 était de +24,5 % en 2024 en dollars américains, mais l'indice S&P 500 Momentum Net Total était de +45,7 %, son plus grand écart de surperformance au cours des 10 dernières années.

[15] Source : Michael Cembalest, JP Morgan Asset Management. Traduction libre.

[16] S&P Global SPIVA™ Global Scorecard, mi-année 2024

[17] Les clients hyperscaler : clients qui, en qualité de fournisseurs, proposent des services de nuage informatique et de gestion de données aux organisations qui ont besoin d’une vaste infrastructure pour le traitement et le stockage de données à grande échelle.

[18] Source : Bank of America.

[19] https://www.patrimonica.com/all-news/q4-2023-market-review

[20] Source : LPL Financial, Bloomberg.

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