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IA déchaînée et autres lieux communs

Montréal, le 17 avril 2023 Les marchés boursiers ont surmonté une série de développements macroéconomiques et fondamentaux négatifs pour afficher des rendements positifs au premier trimestre de 2023. En effet, les investisseurs en actions ont semblé regarder au-delà de la tendance plutôt effroyable marquée par la lecture la plus récente de l’indice PMI manufacturier de l’ISM[1], la baisse du nombre de premiers appels publics à l’épargne et de fusions et acquisitions, la compression des marges bénéficiaires et la baisse des bénéfices[2] pour conclure que la perspective d’un pic à court terme des taux d’intérêt serait le catalyseur qui contribuera à améliorer le sentiment des consommateurs et des PDG, ce qui serait propice aux actifs de longue durée, y compris les marchés boursiers. Les investisseurs boursiers regardent probablement au-delà de la mesure de la composante logement de l’IPC américain (dont nous avons déjà souligné les pièges[3]) et supposent que l’inflation est déjà beaucoup plus faible que le chiffre rapporté. Pour être plus précis, l’indice MSCI All Countries World, l’indice S&P 500 et l’indice composé S&P TSX ont progressé[4] de 7,02 %, 7.36 % et 4.55 % respectivement au cours du trimestre. Fait intéressant, à l’exclusion des émetteurs qui sont devenus des cibles de prise de contrôle au cours du trimestre, les titres les plus performants comprenaient une collection d’émetteurs liés au domaine de la cryptomonnaie et de l’intelligence artificielle et certaines grandes capitalisations du secteur des technologies de l’information qui ont essuyé les plus importants reculs l’an dernier comme Facebook (Meta), Tesla et Nvidia. Les retardataires, en revanche, étaient concentrés dans le secteur de l’énergie en raison de la baisse des prix du pétrole brut et du gaz naturel et, pour des raisons que nous avons déjà évoquées plus tôt ce mois-ci, du secteur financier. Les marchés des titres à revenu fixe ont progressé en sympathie avec les marchés boursiers alors que les signes montrant que les taux plus élevés faisaient des ravages sur l’économie se multipliaient, occasionnant ainsi des baisses de rendements obligataires pour toutes les échéances. Les fluctuations des courbes des taux d’intérêt ont été particulièrement aiguës à la suite de la débâcle de la Silicon Valley Bank, alors que les taux ont chuté d’un montant record sur une courte période et que la volatilité implicite des taux d’intérêt, telle qu’approximée par l’indice ICE Bank of America Merrill Lynch MOVE, a bondi à un niveau record. Bien que la réponse de la politique américaine, en particulier le Bank Term Funding Program (« BTFP » - financement à terme de la banque) de la Réserve fédérale soit perçue de manière salutaire du point de vue de l’amélioration de la liquidité, le consensus est que les tensions persistantes dans le secteur bancaire vont conduire à des conditions d’emprunt plus strictes. Ainsi, les écarts de crédit ont terminé le trimestre en hausse par rapport au trimestre précédent. Néanmoins, les obligations de sociétés ont généralement surperformé les obligations d’État. En effet, l’indice ICE Bank of America Global Government Bond et l’indice ICE Bank of America Global Corporate ont rapporté 2,66 % et 2,85 % respectivement. Cependant, les obligations à échéance plus longue ont fait beaucoup mieux que les obligations à échéance plus courte. Au moment d’écrire ces lignes, les dépôts auprès des banques commerciales américaines continuaient de décroître, bien qu’à un rythme plus lent qu’ils ne l’ont fait plus tôt en mars[5]. Par conséquent, il semble que les organismes de réglementation aient fait ce qu’il fallait. Cela dit, je trouve personnellement ironique que l’industrie du capital de risque, qui a été le principal bénéficiaire du surinvestissement et des excès de crédit de la Silicon Valley Bank et autres banques semblables, n’ait pas contribué un sou au renflouement de la fragile First Republic Bank[6]. Pour le moment, il semble que le risque d’un resserrement du crédit ait été contenu, car l’évaporation du capital semble avoir été largement limitée à l’industrie du capital de risque, aux sociétés d’acquisition à vacation spéciale (« SPAC ») et à d’autres secteurs hautement spéculatifs. Il serait sans doute plus inquiétant si le capital disparaissait des mains des fournisseurs de capitaux eux-mêmes. Cela représenterait une crise plus difficile à contenir. L’IA DÉCHAÎNÉE Le 30 novembre 2022, le laboratoire d’intelligence artificielle OpenAI a officiellement dévoilé ChatGPT[7], un prototype de logiciel conçu pour simuler des conversations avec des utilisateurs humains. Construit sur la plate-forme du superordinateur Azure de Microsoft et offert gratuitement au public, ChatGPT n’a eu besoin que de 5 jours pour atteindre 1 million d’utilisateurs, l’application la plus rapide de tous les temps pour atteindre un tel jalon, plus rapidement qu’Instagram (2,5 mois), Spotify (5 mois) ou Facebook (10 mois).[8] Le 23 janvier 2023, Microsoft, qui avait déjà investi des capitaux dans OpenAI lors de deux rondes successives en 2019 et 2021, a fait une injection supplémentaire non confirmée de 10 milliards de dollars américains pour poursuivre son développement. L’annonce a été faite moins d’une semaine après le lancement par Microsoft d’un service Azure qui donne accès à une version gérée du ChatGPT d’OpenAI.[9] Les critiques positives recueillies par la sortie de ChatGPT et son potentiel à transformer le piteux moteur de recherche Bing de Microsoft auraient causé des remous au siège social des rivaux de Microsoft / OpenAI dans la baie de San Francisco et fait dévier une course à l’IA naissante alors que Google et Baidu ont respectivement lancé Bard et Ernie au cours du trimestre, leur propre réponse au partenariat Microsoft / OpenAI qui avait déjà abouti à ChatGPT-4,  une version améliorée de l’original. Prenons un peu de recul pour expliquer ce qu’est ChatGPT et pourquoi il est important. ChatGPT est un logiciel de conversation qui utilise de grands ensembles de données textuelles pour apprendre à prédire le mot suivant le plus plausible, ou la séquence de mots la plus plausible, en partant des premiers mots d’une phrase ou d’un contexte. Il est également capable d’appliquer les connaissances acquises lors d’une résolution antérieure d’une tâche à une activité connexe ou similaire. Ce type de grands modèles de langage est appelé generative pre-trained transformers (transformateurs préentraînés génératifs), d’où l’acronyme (« GPT »). Les ensembles de données à partir desquels il a appris sont vastes, allant de bibliothèques numériques entières, de manuels d’utilisation, de documents de recherche, d’articles de journaux et de contenu de médias sociaux généré par les utilisateurs. Le principal avantage de ChatGPT par rapport aux générations précédentes de logiciels conversationnels est qu’il est extrêmement polyvalent. En effet, jusqu’à récemment, les chatterbots étaient limités à fournir des réponses à des séries de questions relativement limitées. En revanche, ChatGPT est capable de fournir des réponses rapides, précises et cohérentes à des questions complexes dans pratiquement tous les domaines. C’est un moyen révolutionnaire de rechercher sur Internet, car au lieu de cliquer sur des liens pour obtenir des réponses, ChatGPT fait cet exercice lui-même et retourne la réponse directement. ChatGPT est un adversaire intarissable à Quelques Arpents de Pièges©. Il est facile de comprendre pourquoi cet outil nouvellement disponible représente une menace sérieuse pour le moteur de recherche d’Alphabet qui occupe la position dominante depuis 20 ans. Mais cela va bien au-delà. ChatGPT se souvient des questions précédentes qui lui ont été lancées dans une conversation et est ainsi capable d’affiner ses réponses en fonction des questions précédentes. Il peut écrire de longs essais, résumer des articles scientifiques, produire des paroles de chansons, déboguer et créer du code informatique et ce n’est qu’une question de temps avant qu’il puisse interagir avec d’autres formes de médias, comme les fichiers audios et vidéos. On ne peut nier que la vitesse et la précision de l’intelligence artificielle générative (« IA ») pourraient stimuler la productivité du travail dans de nombreux domaines. En fait, dans un rapport récent, Goldman Sachs a estimé qu’elle pourrait augmenter la croissance annuelle de la productivité du travail aux États-Unis de près de 1,5 % par an sur une période de 10 ans après une adoption généralisée et augmenter le produit intérieur brut (« PIB ») de 7 %[10]. Goldman Sachs estime en outre que 300 millions d’emplois dans le monde pourraient être exposés à l’automatisation de l’IA. Fait intéressant, contrairement à la première vague d’automatisation qui a déplacé principalement les emplois manuels manufacturiers, l’IA générative a un impact sur les emplois de bureau dans de multiples industries telles que le soutien aux ventes et au marketing, le droit, l’éducation, la comptabilité, la conception et l’ingénierie et bien d’autres. Dans certains cas spécifiques, l’IA générative réduit à néant la valeur marginale de l’expertise humaine. De ce point de vue, l’IA générative pourrait être le choc déflationniste le plus important depuis que la Chine a rejoint l’Organisation mondiale du commerce en 2001[11]. Le butin tiré des gains de productivité n’est généralement pas réparti uniformément dans la société. Dans certaines industries, les entreprises pourraient être en mesure de conserver la part du lion des bénéfices supplémentaires. Dans d’autres, les consommateurs pourraient bénéficier de manière proportionnelle d’une réduction du coût des biens et des services. Néanmoins, une croissance plus forte et des coûts plus faibles ont toujours eu tendance à être une combinaison positive pour les actifs financiers. Pour cette raison, nous intégrons déjà l’ascendance de l’IA générative dans nos prévisions d’inflation à moyen et à long terme et, par ricochet, nos projections de rendement des actifs à moyen et à long terme. Pour être clairs, nous pensons toujours que l’inflation pourrait surprendre à la hausse à moyen terme par rapport aux attentes du consensus, mais pas autant que nous le pensions il y a quelques mois. Cela étant dit, beaucoup de gens soutiennent que l’IA générative n’est pas prête pour une adoption de masse. Ils soulignent des exemples où ChatGPT n’a pas réussi à repérer des contradictions ou des anachronismes dans une question, où il régurgitait des informations trompeuses, faisait des allégations diffamatoires ou semblait exprimer certains préjugés politiques ou culturels. Puisque ChatGPT est à la base un modèle statistique qui fait des inférences, il est normal qu’un petit pourcentage de ses réponses soient inexact. Il s’améliorera avec le temps. Certaines critiques sont plus fondamentales. Par exemple, le linguiste et intellectuel Noam Chomsky, dans une interview avec Open Culture, a suggéré que ChatGPT n’était rien de plus qu’un « plagiat high-tech[12] » et un « moyen d’éviter d’apprendre ».  Dans le même ordre d’idées, l’auteur-compositeur Nick Cave, après avoir disséqué des paroles écrites par ChatGPT dans son propre style, a simplement déclaré que c’était « une moquerie grotesque de ce que c’est d’être humain ». D’autres, alarmés par les prouesses de ChatGPT, vont plus loin, affirmant que l’IA générative s’est rapprochée du point où elle constitue une menace existentielle civilisationnelle[13]. En fait, plus d’un millier de personnalités de la haute technologie ont demandé aux entreprises de recherche et de développement en IA de suspendre leurs efforts pour développer quelque chose de supérieur à ChatGPT-4[14]. Je crois qu’une pause volontaire n’est pas une bonne idée parce que les organisations criminelles ne se soumettraient jamais à une pause volontaire. Au contraire, sachant que d’autres développeurs d’IA générative devaient se soumettre à une pause, les criminels feraient tout pour utiliser la fenêtre à leur avantage, la recette parfaite pour que le processus de développement de l’IA devienne incontrôlable. Quoi qu’il en soit, je ne pense pas qu’une pause dans le développement puisse être efficacement mise en œuvre sur la base de la courbe d’adoption historique de certaines inventions révolutionnaires remarquables. Je note par exemple qu’une fois que Gutenberg a déployé sa presse à imprimer de type mobile, il n’y avait rien que les nombreux moines médiévaux chargés de copier la Bible pouvaient faire pour empêcher d’être désintermédiés. De même, Karl Benz n’a pas attendu l’apparition du feu de circultation[15] ou que Ralph Nader force l’adoption de la ceinture de sécurité[16] pour continuer à fabriquer des automobiles, pas plus que les autorités de la ville de Baltimore ont écouté les lobbyistes d’éclairage au gaz après que les lumières électriques ont été popularisées dans les années 1880, fournissant une lumière de meilleure qualité pour un tiers du coût[17]. L’IA générative est devenue virale. À juste titre, car elle offre beaucoup de promesses. Malgré cela, il serait sage de se rappeler ce que Sam Altman, le créateur de ChatGPT, a dit à propos de sa progéniture: « ChatGPT est incroyablement limité, mais assez bon à certaines choses pour créer une impression trompeuse de grandeur. C’est une erreur de s’y fier pour quoi que ce soit d’important en ce moment. C’est un aperçu des progrès; nous avons beaucoup de travail à faire sur la robustesse et la véracité.[18] » Dans cet esprit, il est peu probable que je délègue à ChatGPT la tâche de rédiger de futures lettres financières. PROBLÈMES POUR LES ENTREPRISES ZOMBIES ET VAMPIRES La plupart d’entre vous ont entendu le terme banque zombie ou société zombie. Il est utilisé pour décrire les entreprises qui génèrent des liquidités et qui sont en mesure de couvrir leurs coûts de fonctionnement de base et fixes, y compris les intérêts sur leur dette, mais qui seraient structurellement incapables de rembourser le capital de leur dette sans aide externe, subventions ou émission dilutive d’actions. Le terme zombie a été emprunté au folklore haïtien et se réfère à un homme qui est sous l’effet d’un filtre ou d’un charme qui lui enlève sa personnalité. Les zombies sont souvent dépeints comme des êtres en décomposition lente, sans âme et sans but réel. Le concept a d’abord été appliqué à de nombreux bénéficiaires du soutien des banques japonaises après l’éclatement de la bulle immobilière du pays à la fin des années 1980, mais a ensuite été appliqué à certaines entreprises financières américaines, à la suite de la crise financière mondiale (Global Financial Crisis « GFC ») de 2008, et aux producteurs d’acier, d’aluminium et de ciment et de papier chinois en 2015. Les sociétés zombies ont toujours été présentes sur les marchés boursiers publics. D’un point de vue économique, les zombies ont une influence négative parce qu’elles consomment inévitablement plus de ressources qu’elles n’en produisent. S’il n’y en a que quelques-uns, les effets économiques négatifs restent gérables. Mais dans un scénario où la croissance ralentit alors que les coûts du service de la dette augmentent, les zombies peuvent rapidement se multiplier et devenir une force destructrice dans l’économie. À ce stade, le dilemme entre maintenir les zombies en vie, en les nourrissant perpétuellement, ou les laisser périr, est plus facilement résolu que lorsque leur nombre est une simple nuisance. Pour être clairs, nous ne pensons pas qu’une apocalypse zombie soit imminente, mais nous pensons que la politique publique envers les entreprises zombies pourrait devenir moins complaisante et que leurs conditions d’exploitation pourraient se détériorer rapidement. En tant que telles, les sociétés zombies existantes et potentielles devraient repenser la viabilité à long terme de leur stupeur. Au-delà des zombies, il existe un autre type de société qui a pris son nom d’une créature mythologique redoutée. Ce type de société est apparu plus récemment et est moins commun que la société zombie : la société vampire. Le terme a été introduit pour la première fois il y a quelques années par le professeur Michael Wade de l’International Institute for Management Development (« IMD ») à Lausanne[19] pour décrire les entreprises qui sont en mesure d’offrir leurs produits et services à moindre coût que les titulaires et d’offrir une expérience client inégalée à l’échelle mondiale. Comme le vampire de la fin de la période littéraire romantique, ces compagnies sont séduisantes et sont implacables dans la poursuite de leur mission. C’est le contraire des entreprises zombies. Selon le professeur Wade, les exemples de sociétés vampires incluent Uber (industrie du taxi et du covoiturage), Amazon (librairies), Netflix (location de films) et Alphabet (recherche sur Internet). Les sociétés vampires opèrent en détournant les revenus et les bénéfices des leaders de l’industrie vers eux-mêmes. Pour employer une analogie vampirique, ils prennent le contrôle de la réserve de sang. Le problème pour les vampires est que la réserve de sang finit par s’épuiser. Par exemple, la part de marché du modèle T de Ford est passée de 8 % l’année de son introduction en 1908 à 61 % en 1921[20]. Bien que les revenus aient continué d’augmenter par la suite, la croissance a ralenti parce que le bassin devenait vide et qu’il n’y avait plus de titulaires à déplacer. En l’occurrence, la croissance des entreprises vampires commence à converger vers celle de l’économie plus large. Dans le cas d’Alphabet et de Facebook, la taille de la réserve sanguine est déterminée en grande partie par le budget publicitaire des entreprises qui paient pour apparaître dans les recherches sur Internet. Ainsi, pour survivre, les sociétés vampires doivent trouver d’autres réserves de sang, se diversifier dans des industries et des catégories adjacentes. Certaines entreprises de vampires ont incroyablement réussi à identifier et exploiter d’autres réserves de sang. Amazon, qui à elle seule génère près de 50 % de toutes les ventes de commerce électronique aux États-Unis, est le suzerain des sociétés vampires, à mon avis. D’autres ont eu moins de succès. Au cours de la dernière année, la croissance du chiffre d’affaires de certaines des sociétés vampires mises en évidence ci-dessus a déçu et le cours de leur action a sous-performé[21]. Il est encore trop tôt pour dire si ce n’était qu’un accident de parcours ou si la baisse du cours de l’action des sociétés vampires reflète une révision du consensus de marché à propos de la réserve de sang de ces entreprises ou pire, sur leur capacité à trouver de nouvelles réserves de sang, comme le projet métavers pour Facebook, l’iCar pour Apple ou des événements en direct pour Netflix ... Ce qui pourrait devenir intéressant, c’est si deux ou plusieurs sociétés vampires devaient s’affairer autour de la même réserve. Je me demande si une bataille particulièrement féroce pourrait provoquer une érosion des marges au point de transformer les deux en zombies... GöTTERDäMMERUNG[22] ? Lors du Forum économique mondial de Davos en janvier, Mohammed al-Jadaan, ministre des Finances d’Arabie saoudite, a mentionné que le royaume était ouvert au règlement du commerce du pétrole et du gaz naturel dans des devises autres que le dollar américain et l’euro. Cette déclaration a attiré beaucoup d’attention, alors j’ai décidé d’investiguer un peu plus loin pour voir si cela signalait indirectement que le statut de monnaie de réserve mondiale dont le dollar américain jouit depuis l’accord de Bretton Woods en 1944 a été miné. Si c’est le cas, cela pourrait entraîner une faiblesse structurelle du dollar américain pour les années à venir et bouleverser le rôle du billet vert en tant qu’outil de couverture de portefeuille pour les investisseurs non domiciliés aux États-Unis. Mettons certaines choses en perspective. Tout d’abord, considérez que la part du dollar américain dans les réserves de devises étrangères des banques centrales mondiales s’élevait à environ 56 % au troisième trimestre de 2022[23]. Il était d’environ 70 % au tournant du siècle. La représentation du dollar américain a diminué, mais la part de marché perdue a été redistribuée dans un certain nombre de devises, y compris des devises non traditionnelles[24]. Deuxièmement, considérez qu’environ la moitié du commerce des biens et des services à l’échelle mondiale est facturée en dollars américains, tandis que les États-Unis ne représentent que 10 % du volume, deux chiffres relativement constants au cours des dernières années. Troisièmement, considérez que, selon la Banque des règlements internationaux, le dollar américain est utilisé dans environ 90 % des transactions en devises étrangères (sur 200 %, car il y a deux devises impliquées dans une transaction de change). Aussi, un chiffre relativement constant ces dernières années. À première vue, si une devise alternative est ascendante, les données ne sont pas encore convaincantes. Il convient de noter que la Chine, qui a surpassé les États-Unis en tant que plus grand partenaire commercial de l’Arabie saoudite depuis 2011 (grâce à la révolution américaine du pétrole de schiste qui n’a plus rendu le pétrole de l’Arabie saoudite essentiel), fait pression sur l’État du Golfe pour qu’il accepte des paiements en yuan pour ses importations de pétrole et de gaz naturel depuis un certain temps. Soit dit en passant, les deux pays se sont rapprochés de plus en plus récemment. En fait, au premier trimestre, Saudi Aramco a acquis une participation de 10 % dans le raffineur chinois privé Rongsheng Petrochemical Co., Ltd. pour environ 3,6 milliards de dollars et a convenu séparément de fournir 490 000 barils de pétrole brut par jour à une filiale de Rongsheng[25]. Il est donc peut-être tout à fait naturel que les deux pays s’éloignent d’une convention de règlement de paiement datant des années 1970. Il est également possible, du point de vue de l’Arabie saoudite, qu’il s’agisse simplement d’une façon pour le Royaume d’exprimer qu’il ne considère plus son alliance avec les États-Unis aussi importante qu’auparavant, qu’il puisse s’en tirer sans les États-Unis. Pourtant, si la promiscuité entre la Chine et l’Arabie saoudite conduisait au règlement des exportations de pétrole brut vers la Chine en yuan, qu’est-ce que cela signifierait? Eh bien, il s’avère que la valeur des exportations de pétrole de l’Arabie saoudite vers la Chine était de 38,3 milliards de dollars américains. En comparaison, la valeur du commerce mondial était de 32 billions de dollars américains en 2022. Par conséquent, la valeur des exportations de pétrole de l’Arabie saoudite vers la Chine représentait environ 0,12 % du volume du commerce mondial. Sur la base de ce qui précède, il ne semble pas que le règne du dollar américain en tant que monnaie de réserve mondiale soit en train de prendre fin. Il s’agit probablement simplement d’un processus lent par lequel les banquiers centraux visent à diversifier les réserves de devises étrangères et par lequel les partenaires tentent de régler le commerce dans leurs propres devises par opposition à une monnaie intermédiaire, ce qui a été rendu plus possible grâce à la réduction du coût de négociation des devises et d’autres facteurs. Nonobstant ce qui précède, il est possible que dans un paysage géopolitique fracturé, les transactions bilatérales deviennent fréquentes et que la tendance à la dé-dollarisation s’accélère.  Mais pour le moment, la stabilité, la profondeur et l’ampleur des actifs libellés en dollars américains, couplées à la puissance militaire du pays et à son rôle historique d’arbitre des conflits, m’amènent à croire que le risque d’effondrement du dollar américain est exagéré. En fait, l’indice du dollar américain n’est que de quelques points de pourcentage du sommet atteint l’an dernier. Après tout, l’Arabie saoudite pourrait trouver une certaine utilité pour les yuans qu’elle reçoit en échange de pétrole, mais je doute sérieusement que la même approche puisse être extrapolée à la monnaie de partenaires commerciaux comme l’Indonésie, l’Afrique du Sud ou le Pakistan...  Si je me trompe et que la demande de dollars américains à l’échelle internationale faiblit précipitamment, cela pourrait entraîner une augmentation notable du taux d’emprunt des États-Unis et faire en sorte que des importations américaines deviennent une source d’inflation pour la première fois en plus de 50 ans. Merci de votre support, Dimitri Douaire, M. Sc., CFA Chef des placements [1] À la fin de février 2023, l’indicateur de l’Université du Michigan était à son plus bas niveau depuis mai 2020. [2] Source: FactSet [3] https://patrimonica.com/rising-inflation-what-asset-owners-can-do-about-it/?lang=en [4] Sauf indication contraire, index le rendement; références rendements totaux libellé en monnaie locale. [5] Source : Banque fédérale de réserve de St-Louis, Rapport hebdomadaire sur les dépôts des banques commerciales américaines. [6] C’était un consortium de banques dirigé par JP Morgan qui a fourni un filet de sécurité de dépôt de 30 milliards à la First Republic Bank. [7] Fondée en 2015 à San Francisco par Sam Altman et un groupe d’entrepreneurs, dont Elon Musk (Tesla, Space X, The Boring Company...)et Peter Thiel (PayPal, Palantir Technologies). L’entreprise est également à l’origine des applications DALL-E-2 et Whisper.AI. [8] Source: Statista. [9] Source : SiliconAngle. [10] Goldman Sachs Economic Research, The Potentially Large Effects of Artificial Intelligence on Economic Growth, Hatzius et tous. Le 26 mars 2023 [11] L’adhésion a entraîné une réduction des droits de douane et des obstacles au libre-échange. [12] https://www.openculture.com/2023/02/noam-chomsky-on-chatgpt.html [13] The Guardian, 17 janvier 2023 [14] https://futureoflife.org/open-letter/pause-giant-ai-experiments/ [15] Karl Benz est crédité pour la première automobile fonctionnelle à quatre roues propulsées par un moteur à combustion interne en 1886. En revanche, l’État du Connecticut a été le premier à installer des feux de circulation à trois voies en 1930, 44 années plus tard. [16] Ralph Nader, Unsafe at Any Speed: The Designed-In Dangers of the American Automobile, Grossman Publishers, 1965. [17] L’Illuminating Engineer, Public Lightning in Baltimore, 1909. [18] Fil Twitter de Sam Altman, 10 décembre 2022. [19] https://www.imd.org/faculty/professors/michael-wade/ [20] Robert Lacey. Ford: Les hommes et la machine. Boston: Little, Brown, 1986 [21] Selon M. Haver, le VE/BAIIA des entreprises impliquées dans un thème de numérisation a diminué de 28 % (Technologies de la santé) et 42 % (Fintech) entre novembre 2021 et octobre 2022. [22] Webster: un effondrement (comme d’une société ou d’un régime) marqué par une violence catastrophique et désordre. [23] Source : Estimations du Fonds monétaire international [24] Autre que l’euro, les Japonais Yen et la livre sterling. [25] Source : Reuters. Crédit photo

Désinflation et autres lieux communs

Montréal, le 13 janvier 2023 Toutes les catégories d’actifs ont connu l’agitation du dernier trimestre de 2022. Plus précisément, les participants du marché ont d’abord été encouragés par des résultats trimestriels généralement au-delà des attentes aux États-Unis, par des signes de décélération de l’inflation et par la résilience du marché du travail. Ainsi, les principales places boursières ont bondi de plus de 10 % entre le 1er octobre et le 30 novembre 2022. Cependant, ce sentiment a changé lorsque le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a réitéré qu’il était prématuré d’envisager le ralentissement du rythme des hausses de taux d’intérêt et que de nouvelles mesures de confinement liées à la COVID avaient été émises en Chine. Les deux manchettes ont été considérées comme pouvant nuire aux chances d’une reprise de croissance, ce qui a conduit les marchés boursiers à effacer une partie de leurs gains à la fin du trimestre. En fin de compte, le MSCI All Countries World Index[1], le S&P 500 Index et le S&P TSX Composite Index ont progressé de 7,36 %, 7,42 % et 5,96 %, respectivement, au cours du trimestre. Néanmoins, cette performance laisse un goût amer étant donné que les mêmes indices ont terminé l’année 2022 avec des baisses de -15,98 %, -18,51 % et -5,84 %, respectivement, leur pire depuis 2008. D'un point de vue stylistique, les titres de valeur ont surpassé les titres de croissance, un écart de plus de 10 % au cours du trimestre et de près de 25 % pour l'année; c’est le bouleversement d’un paradigme qui aura marqué les 10 années précédentes. Ce surpassement est une conséquence de la performance du secteur de l'énergie qui est fortement représenté dans les indices de valeur, alors que les secteurs des biens de consommation cyclique et de la technologie sont plutôt liés aux indices de croissance. Par ailleurs, le secteur de l’énergie est celui s’étant le plus apprécié au cours du trimestre, car la perspective d'une pénurie de gaz naturel imminente en Europe occidentale aiderait les producteurs de pétrole et les raffineurs à préserver leurs marges malgré le ralentissement de l'économie mondiale. En revanche, les secteurs des technologies de l’information et de la consommation discrétionnaire ont été à la traine, car les fêtes de fin d'année représentent maintenant une période incertaine pour les détaillants et les constructeurs automobiles. La reprise des titres à revenu fixe a été moins marquante; les participants du marché tentaient de concilier l'évolution de l'inflation avec l’évolution de la croissance tout en étant peu rassurés par les indications prospectives données par les banques centrales. La quasi-absence d’émissions et de défauts d’obligations d'entreprises a aidé le marché du haut rendement à enregistrer la meilleure performance avec un bond de 5,03 % au cours du trimestre (ICE Bank of America Global High Yield Index), devant le gain de 3,22 % des obligations corporatives ICE Bank of America Global Corporate Index). Les banques centrales ont maintenu leur politique de resserrement. Conséquemment les obligations gouvernementales ont moins bien performé en raison de leur sensibilité aux taux d'intérêt. D’ailleurs, le ICE Bank of America Global Government Bond Index a enregistré une perte de -0,31 % au cours du trimestre. Alors que les taux d'intérêt à court terme montaient sans cesse, les instruments de revenu fixe à taux variable, dont le taux de paiement du coupon augmente avec la hausse des taux d'intérêt, ont généralement mieux performé au cours d'une année plutôt difficile. Le ICE Bank of America Floating Rate Treasury Index a augmenté de 1,01 % au quatrième trimestre et de 2,08 % pour l’année 2022. Bien que la dette à taux variable ait affiché un rendement positif modeste, les instruments à courte durée, quant à eux, ont enregistré des pertes moyennes limitées. Même si la plupart des marchés à revenu fixe ont connu une bonne performance au cours du dernier trimestre de l’année, pratiquement toutes leurs stratégies ont enregistré des pertes de -10 % à -15 %. La dernière fois qu’un rendement aussi médiocre avait été observé dans ce qui est généralement perçu comme une catégorie d’actifs défensifs, Pierre Elliot Trudeau était premier ministre du Canada et René Lévesque son homologue du Québec. Le marché des matières premières, comme représenté par S&P GSCI Commodities Index, a connu une hausse de 3,44 % durant le trimestre et a terminé l’année avec un rendement de 25,98 %. L’observation des différentes composantes révèle une image mitigée; les groupes des métaux affichent de solides gains tandis que le secteur de l'énergie et le secteur agricole sont demeurés stables au cours du trimestre. CRYPTO : LE DERNIER SURVIVANT Depuis sa création, il y a un peu plus de dix ans, l'industrie des actifs numériques[2] a attiré de nombreux entrepreneurs. Malheureusement, ils n’étaient pas tous bienveillants et structurés. Dès le départ, l’échec de Mt.Gox[3] en 2014 a démontré que l’industrie tend inhabituellement vers la fraude, le détournement de fonds, le vol et la mauvaise gestion. Il y a même eu de mystérieuses disparitions qui demeurent non résolues à ce jour. La résilience de cette industrie a été mise à l’épreuve à plusieurs reprises. Bien qu’elle ait survécu, elle a réalisé qu’elle devait s’améliorer pour se tailler une place dans les marchés financiers et gagner l’approbation des investisseurs institutionnels. Puis est arrivé Sam Bankman Fried (« SBF »), diplômé de la Massachusetts Institute of Technology (« MIT »), fils de deux professeurs de la Stanford Law School et adepte du mouvement pour un altruisme efficace de William McCaskill[4]. Il avait tout d’un prophète proréglementation en invitant activement la Securities and Exchange Commission (« SEC ») à faire un examen minutieux de l'industrie. Les manières inhabituelles de SBF lui conféraient un air d’authenticité. À peine deux ans après avoir fondé FTX, l’ancien trader de Jane Street[5], âgé de 30 ans, était devenu le « bon gars » de la crypto, un rôle aux avantages multiples dont ceux d’être appuyé par des célébrités telles que Stephen Curry des Golden State Warriors, Kevin O’Leary (également connu sous le nom de Mr. Wonderful) de Shark Tank et le couple puissant de l’époque Tom Brady et Gisele Bundchen. SBF a utilisé les sommes amassées lors de divers cycles de financement de FTX pour acheter les droits d’affichage du stade du Miami Heat en Floride et est devenu l'un des 10 plus grands donateurs individuels à la campagne présidentielle des É.-U. en 2022[6]. SBF a tout mis en œuvre pour que les cryptospéculateurs fassent d’abord et avant tout confiance à FTX. Cependant, au début novembre 2022, FTX a implosé et déclaré faillite, puis SBF a démissionné de son poste de PDG. Quelques mois auparavant, FTX était évaluée à 32 milliards de dollars US. Selon le témoignage de John J. Ray III[7], FTX pourrait être la plus grande fraude corporative depuis Enron. Pourtant, invraisemblablement, SBF semblait en voie de démarrer une tournée médiatique en participant à une longue conversation avec le New York Times et divers podcasts précédant sa convocation devant le tribunal fédéral de Manhattan quelques jours plus tard avant d’être libéré moyennant une caution de 250 millions. Si vous avez le moindre doute sur la gravité des accusations, sachez que la caution de Bernie Madoff n'était que de 10 millions. Avec le recul, il y avait des signaux d’alarme partout. Premièrement, FTX et ses filiales engageaient des personnes inexpérimentées et non qualifiées pour exercer des rôles clés. Certains avaient des antécédents douteux facilement vérifiables. Cela aurait pu être acceptable pour une petite compagnie, mais pas pour une entreprise évaluée à 32 milliards de dollars desservant plus d'un million de clients. Deuxièmement, il peut s'avérer que SBF entretenait une relation amoureuse avec un autre cadre de FTX. Troisièmement, les systèmes utilisés pour la comptabilité et la régie interne étaient inacceptables pour une entreprise de cette envergure. Quatrièmement, la présence de conflits dus aux transactions de FTX avec sa filiale Alameda et les entreprises ayant précédemment participé aux levées de fonds de FTX ainsi que les prêts accordés aux employés étaient également problématiques. La question se pose : si tant de personnes brillantes et bien informées ont échoué leurs vérifications diligentes de FTX et de SBF, comment aurions-nous pu éviter de tomber dans le piège? La triste réalité est que pour beaucoup de gens, le concept de vérification diligente consiste à s'asseoir pendant quelques heures, sans s’être préparé au préalable, pour écouter un argumentaire de vente de haut niveau faisant suite à un simple démarchage téléphonique ayant eu lieu quelques semaines plus tôt. Dans les faits, une vérification diligente s’apparente à une investigation policière. L’investigateur cherche les signes qui pourraient invalider l’histoire qui lui est racontée. Un bon exemple, selon moi, est le personnage de l’inspecteur Columbo, incarné par Peter Falk sur les ondes de NBC dans les années 70. Columbo avait une phrase fétiche qui ennuyait les suspects: « encore une chose! ». Parfois, les suspects se rendaient ou s’incriminaient involontairement. C’était ça le but. L’approche devrait être conçue pour repérer les incohérences, les contradictions, ainsi que recueillir l’information manquante avant que le suspect ne quitte le banc des accusés. Cela signifie parfois être persistant au point d’être agaçant, mais c’est ce qu’il faut pour éviter de payer le prix de s’être trompé. D’une certaine manière, celui qui exécute bien sa vérification diligente est l’inspecteur Columbo du monde financier. Bitcoin a perdu environ deux tiers de sa valeur en 2022. De nombreux spéculateurs misant sur de faibles coûts d'emprunt pour établir des positions ont disparu. Certains caractérisaient SBF comme le dernier survivant. Maintenant que ce puissant prophète est tombé, il reste à savoir si quelqu'un se tiendra debout à la fin ou si l'industrie des actifs numériques est si corrompue qu’elle est vouée à l’insignifiance ou la disparition. ESG EN REDÉMARRAGE Il y a quelques années, j’avais fait part de mes soucis quant aux stratégies d’investissement qui appliquent les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (« ESG ») dans le processus de sélection des actions[8]. J’abordais le fait que leur performance était attribuable à leur exposition accidentelle à d’autres facteurs plutôt qu’aux mesures ESG utilisées et qu’elle s’apparentait à celle des stratégies axées sur les titres de croissance de grande capitalisation. Ces affirmations ont été confirmées par tous nos gestionnaires qui emploient des méthodes quantitatives pour sélectionner les titres. En effet, ces derniers n’arrivent pas à discerner des critères de sélection ESG distincts dont les résultats sont différents des filtres traditionnels déjà existants. J’avais aussi souligné qu’il était possible pour un émetteur de se retrouver dans un portefeuille d’actions ESG même si ce dernier avait une cote faible sur un ou deux des trois piliers tant que sa cote au troisième dépasse la moyenne du marché ou de l’industrie. Ce qui signifie que les investisseurs emballés par le concept ESG pourraient être victimes de certaines incohérences. J'avais donc des soucis, disons, philosophiques. Or, ceux qui investissent dans les stratégies ESG se sont retrouvés avec plus que de simples préoccupations philosophiques à résoudre. Tout d'abord, la performance de la majorité des stratégies ESG s’est avérée décevante par rapport aux principaux indices depuis le troisième trimestre 2021. Tel que je l’avais prédit, elle s’est alignée quelque peu avec celle des stratégies qui mettent l'accent sur les grandes capitalisations à saveur croissance. Celles qui excluaient d’emblée le secteur des énergies fossiles se sont encore moins bien comportées. Puis, comme l'avait promis le président de la SEC, Gary Ginsler, après sa nomination en 2021, son équipe a accordé une attention particulière aux informations fournies par les firmes d’investissement lorsqu’ils tiennent compte des facteurs ESG dans leur processus décisionnel. À la suite de ces enquêtes à la fin novembre, la SEC a inculpé une filiale de Goldman Sachs pour non-respect de ses politiques et procédures impliquant deux fonds communs de placement et une stratégie déployée dans un compte ségrégué, tous étant commercialisés comme respectant certains critères ESG prescrits. Pour régler les accusations, Goldman Sachs a accepté de payer une amende de 4 millions de dollars. Apparemment, Goldman Sachs avait mis en place un processus formel de sélection des investissements avec des mesures ESG, mais le processus n'était pas systématiquement suivi. Naturellement, les investisseurs se demandent si l’étiquette ESG sur un produit d'investissement est quelque chose de concret ou simplement un stratagème de commercialisation conçu pour leur soutirer plus de frais pour un service à valeur ajoutée. En outre, les concepts ESG ont été critiqués par des législateurs américains à la fin de l'été. Le gouverneur Rick DeSantis a demandé au Sénat de l'État de la Floride d'adopter une résolution exigeant que le fonds de pension de l'État investisse dans des entreprises qui ne tiennent compte que des « facteurs pécuniaires » et « n'incluent pas la promotion d'intérêts sociaux, politiques ou idéologiques ». Cela restreint l'investissement de l'État dans tout fonds de gestion d'actifs qui appliquent les critères ESG dans son processus d'investissement. Le Texas a adopté une approche similaire en votant deux projets de loi distincts qui interdisent à l'État de conclure des contrats avec des organisations ESG qui boycottent l'industrie des combustibles fossiles ou des armes à feu. Peu de temps après l'adoption des projets de loi, le contrôleur de l'État a même publié une liste complète des organisations boycottées. Au moment d'écrire ces lignes, de nombreux autres États envisagent une législation similaire. Blackrock, le plus grand gestionnaire d'actifs au monde, avec un peu moins de 9 000 milliards d'actifs au 30 septembre 2022 et qui est reconnu pour ses références ESG, a été le gestionnaire le plus souvent cité par les législateurs dans leur justification. Je ne crois pas que ces efforts freineront la croissance des ESG. Au contraire, ce sont des étapes pénibles, mais nécessaires pour que la divulgation liée aux critères ESG soit normalisée à l'échelle mondiale et pour que les mandats deviennent plus spécialisés et moins sujets à des contradictions internes. Toutefois, ce contrecoup pourrait inciter certaines firmes de gestion d’actifs à revenir sur leur programme ESG pour contourner le risque de désinvestissement de certains groupes à motivation politique ou pour éviter de perdre leur part future d’un gâteau grandissant. QUELQUES MOTS SUR L'OBÉSITÉ, ALZHEIMER ET LA PHYSIQUE PURE ET DURE Nous tournons la page d'une année sombre qui a apporté une série de développements géopolitiques et macroéconomiques néfastes, ainsi j'ai pensé qu'il valait la peine de discuter de quelques-uns des développements positifs qui ont attiré mon attention. Le premier que j’aimerais aborder est la décision de la FDA (U.S. Food and Drug Administration / Agence fédérale américaine des produits alimentaires et médicamenteux) d’émettre la désignation « accélérée » à la molécule tirzepatide d'Eli Lilly and Co. pour le traitement de l’obésité ou du surpoids avec comorbidités chez les adultes[9]. Le médicament pourrait être approuvé pour le traitement de l'obésité d’ici la mi-2023. La molécule, qui avait été approuvée plus tôt en 2022 pour le traitement du diabète de type II par la FDA et vendue sous le nom de Mounjaro™, a réussi un récent essai clinique de phase III en procurant de bien meilleurs résultats que ceux de Wegogy et Saxenda, les médicaments phares précédemment approuvés pour le traitement de l'obésité. Cette maladie est connue pour favoriser le développement d'autres affections telles que le diabète de type II ou les maladies cardiovasculaires. Cela entraîne et complique le traitement d'autres maladies comme le cancer et, comme on l'a vu avec la pandémie, des maladies respiratoires. Ainsi, non seulement l’obésité augmente le risque de décès, elle contribue indirectement à réduire considérablement l'espérance de vie des patients. L'obésité pèse lourdement sur les finances publiques et représente près de 200 milliards de dollars par an en coûts directs et indirects aux États-Unis seulement[10]. Ainsi, les analystes de Wall Street estiment que les ventes annuelles de tirzepatide pour le traitement de l'obésité pourraient dépasser les 25 milliards[11], ce qui détrônerait Humira, le médicament contre l'arthrite d'AbbVie, l'actuel détenteur du record (à l'exclusion du vaccin à ARNm de Pfizer/BioNtech contre la COVID-19). Le deuxième développement positif provient également du secteur médical. Cette fois, il est lié au traitement de la maladie d'Alzheimer, qui échappe à la science depuis trois décennies. En juin 2021, la FDA a approuvé l'aducanumab, un médicament développé par Biogen et vendu sous le nom d'Aduhelm™ pour le traitement de certains cas de la maladie d'Alzheimer. En raison des risques d'effets secondaires importants, notamment enflure et hémorragie cérébrale, en plus d'allégations d'interactions inappropriées entre les responsables de la FDA et l'équipe scientifique de Biogen au cours du processus d'approbation, Aduhelm™ n'a pas été largement prescrit, au grand désespoir de la communauté Alzheimer tristement habituée aux faux espoirs et aux controverses. Heureusement, un autre médicament contre la maladie d'Alzheimer, le lecanemab, développé par le groupe pharmaceutique japonais Eisai (en partenariat avec Biogen), s'est montré prometteur. Il a été démontré que le médicament, qui devrait être disponible dès janvier 2023 sous le nom de Leqembi™, ralentit le déclin cognitif de 27 % chez les patients présentant des troubles cognitifs légers à un stade précoce. Ceci ne se veut pas une recommandation d'acheter les actions d'Eli Lilly, Eisai ou Biogen. Au contraire, les développements positifs associés à ces thérapies se reflètent déjà probablement dans le prix. Le but de cette discussion est de mettre en évidence les progrès réalisés dans le domaine de la pharmacologie, qui contribueront à terme à améliorer la longévité et la qualité de vie des personnes souffrant de maladies dévastatrices et pour lesquelles il n’existait aucun traitement reconnu il y a à peine 18 mois. Le troisième développement positif a eu lieu au Lawrence Livermore National Facility le 5 décembre 2022, lorsqu’une équipe de physiciens a réussi à produire plus d'énergie à partir de la fusion d’atomes que l'énergie laser utilisée dans le processus. Il s'agissait de la première expérience de fusion contrôlée à franchir cette étape et du premier véritable pas vers le développement d'une source d’énergie potentiellement illimitée et respectueuse de l'environnement. Le concept de fusion nucléaire a été théorisé au début des années 1930[12] lorsque les scientifiques ont réalisé que c'était ainsi que le soleil s'alimentait. C'est un processus par lequel les faisceaux laser délivrent une grande quantité d'énergie ultraviolette dans une capsule de combustible qui contient des atomes (généralement des isotopes d'hydrogène comme le protium, le deutérium et le tritium) que le laser fusionne tout en libérant de l'énergie. Les principaux avantages de la fusion nucléaire par rapport à la fission nucléaire comprennent la réduction de la radioactivité et des déchets, l'abondance de l'approvisionnement en combustible (isotopes de l'hydrogène) et la sécurité. Cela dit, des défis considérables doivent encore être relevés. Par exemple, la chaleur nécessaire pour produire la réaction atomique est supérieure à 100 millions de degrés. Cela doit être contenu! En tant que tel, dans le meilleur des cas, la technologie est probablement encore à des décennies de voir le jour. Pour cette raison, il est trop tôt d’envisager d'investir dans le prochain SPAC (Special Purpose Acquisition Company / société d'acquisition à vocation spécifique) qui aura le mot « fusion nucléaire » dans son plan d'affaires. Néanmoins, compte tenu de l'urgence déclenchée par l'accélération des changements climatiques, cela pourrait être une source logique de recherche financée à grande échelle par le gouvernement pour les années à venir, un équivalent moderne du projet Manhattan ou de la course à la lune. RÉGLAGE DES PORTEFEUILLES POUR 2023 Je crois que l'année 2023 obligera les professionnels de la gestion de placements à procéder à divers ajustements dans leur programme. En effet, pour la première fois depuis la grande crise financière (Global Financial Crisis – « GFC ») de 2008, la politique monétaire ultra accommodante est moins susceptible de venir au secours des actifs risqués lors de fortes baisses. Comme je l'ai déjà mentionné, les banques centrales du monde occidental, par leurs actions concertées, ont été les principaux contributeurs de l'agrandissement de l'écart des actifs financiers entre leur prix et leur valeur intrinsèque, et de la réduction de la volatilité. Bien que je m'attende pleinement à ce que les banques centrales continuent d'intervenir en cas de perturbation grave et subite du marché, je pense que leurs actions ne seront probablement plus illimitées. Lors d’un retour à la normale, je pense que les banques centrales seront plus tolérantes aux baisses et que cela se traduira par des mouvements prononcés rapides et des tendances plus durables au sein des marchés. Indirectement, cela signifie que le niveau de risque latent sur le marché est peut-être plus élevé qu'à tout autre moment depuis la GFC. Du point de vue de la construction de portefeuille, cela signifie que si la répartition d'actifs d'un portefeuille a été calibrée afin de cibler un niveau de risque précis il y a quelques années, il vaudrait probablement mieux la revoir, car ce portefeuille a nécessairement un risque plus élevé aujourd’hui en raison des événements récents. Incidemment, nous avons réduit l'exposition aux actifs plus risqués dans les portefeuilles discrétionnaires depuis la fin de 2021 et nous maintenons cette position en amorçant l’année 2023. Nos recommandations abondaient dans le même sens pour les mandats de gestion non-discrétionnaires. Quand je me demande ce qui me donnerait envie d'adopter une position plus optimiste, je me dis encore une fois que le réflexe programmé de rééquilibrer en favorisant les actifs risqués chaque fois qu'ils baissaient de 5 % à 10 % n'est plus une option. À l'avenir, cela dépendra de la mesure dans laquelle le sentiment et le consensus se sont détériorés par rapport à ce qui se passe réellement. En fait, c'est ainsi que cela fonctionnait avant 2008. L'augmentation persistante de l'inflation, qui a déclenché l'augmentation la plus rapide des taux d'intérêt à court terme en quatre décennies, a pris presque tout le monde – moi y compris – par surprise en 2022. Bien que l'inflation puisse demeurer au-dessus de la zone de confort des banques centrales pendant quelques années, à court terme, les préoccupations entourant l'inflation passeront de son niveau absolu à son éventail possible dans quelques années. Voici pourquoi. Les banques centrales sont inébranlables dans leurs efforts de freiner les vecteurs de l'inflation causés par une demande globale robuste. Ils relèvent le coût d’emprunt pour inciter les agents à épargner et à retarder les décisions de consommation. En constatant les fortes baisses de prix des maisons neuves, des ventes de voitures et des biens durables, la mesure semble efficace. Il existe des variables qui stimulent l'inflation sur lesquelles les banques centrales n'ont que peu ou pas de contrôle et leurs impacts sont difficiles à prédire. D’abord, la population en âge de travailler va diminuer dans les pays développés. Cette variable est potentiellement inflationniste puisqu’il y aura moins de travailleurs et ceux qui entreront sur le marché du travail seront généralement moins productifs que ceux qui en sortent. Si les mouvements ouvriers réussissaient à s'organiser dans les pays en voie de développement comme ils l’ont fait chez nous il y a un siècle, la variable serait encore plus inflationniste, car cela aurait un impact sur le prix des importations dans les pays développés. Puis, les tensions géopolitiques persistantes qui indiquent probablement que la mondialisation a atteint son apogée. Ce qui signifie que des chaînes d'approvisionnement complexes devront être reprogrammées et de multiples redondances devront être prévues. Cette variable est également inflationniste, mais variera considérablement d'un secteur à l'autre. Finalement, il y a la transition vers une économie à faibles émissions de carbone qui entraîne des inadéquations entre l'offre et la demande d'énergie. Une autre variable inflationniste et très volatile selon le pays. Dans l'ensemble, je n'écarte pas la possibilité que les banques centrales parviennent à causer suffisamment de dégâts pour que la demande de biens et de services se normalise à un niveau qui se traduirait par une stabilisation de l'inflation autour de 2 % comme elle l'a fait au cours des 20 années qui ont précédé 2021, mais je pense que cela est devenu de plus en plus improbable. Il faut se demander si tout cela se reflète dans les marchés. Fait intéressant, malgré ce portrait flou du côté de l'offre, les anticipations d'inflation au cours des cinq et dix prochaines années aux États-Unis sont essentiellement au même niveau qu'il y a deux ans. En fait, bien que l'inflation ait atteint des niveaux jamais vus depuis quarante ans, les titres indexés à l’inflation – Treasury Inflation Protected Securities (« TIPS ») – n'ont pas fait mieux que les obligations gouvernementales nominales au cours de la dernière année. Indirectement, le consensus indique que l'inflation à long terme chutera au niveau observé pendant la décennie prépandémie d'ici quelques années. Je pense que c'est optimiste et en tant que tel, les TIPS pourraient représenter une option peu dispendieuse et plus performante que les obligations nominales dans l’éventualité d’un désencrage des anticipations d'inflation à long terme. Nous cherchons des moyens concrets d'exprimer ce point de vue au bénéfice de nos clients, afin d'améliorer les rendements ajustés au risque. Puisqu’on parle des obligations nominales, le rendement à maturité des obligations d'entreprises de haute qualité avec échéances avant 2028 dépasse désormais 5 %. Ce niveau est supérieur au niveau attendu des taux directeurs à la fin du cycle haussier actuel. Par conséquent, je pense qu'il existe un risque de perte minime pour ce segment. Il représente également une alternative intéressante aux liquidités avec l'avantage potentiel d’appréciation du principal ​​en cas de baisse des taux d'intérêt à court terme par rapport à ceux à moyen terme. Petite anecdote, il y a un an, il était presque impossible d'obtenir des rendements sans risque ou quasi sans risque supérieurs à 2 %, et impossible d'espérer des rendements supérieurs à 5 % sans faire le plein d’obligations à haut rendement et de titres d’émetteurs dans les marchés émergents. En fait, ce fut le cas pendant la majeure partie de la dernière décennie au cours de laquelle il n'y avait pas d'alternative aux actions. Eh bien, les alternatives coulent à flot de nos jours. Je suis moins enthousiasmé par les obligations à plus longue échéance, en particulier les obligations gouvernementales. Premièrement, la structure à terme des taux d'intérêt est inversée tant au Canada qu'aux États-Unis, ce qui signifie que le rendement à maturité des obligations à long terme est inférieur au rendement à maturité des obligations à court terme. Même si c'est souvent le cas dans les mois qui précèdent une récession, on constate que le niveau actuel d'inversion est proche d'un record absolu. Pour cette raison, les investisseurs ne semblent pas correctement rémunérés pour le risque lié à l’incertitude supplémentaire pour une échéance plus éloignée. De plus, comme la Réserve fédérale a commencé à réduire son bilan et n'achète plus d'obligations émises par le Conseil du Trésor, les futures émissions de dette publique américaine auront un acheteur de moins sur lequel compter. Considérant que l'achat d’obligations souveraines par les banques centrales a supprimé artificiellement les taux d'intérêt d’approximativement 1 %, la voie de moindre résistance pour les taux obligataires gouvernementaux à long terme devrait être à la hausse. En fin de compte, les bons du Trésor à long terme devraient rester de bons actifs défensifs dans le cas où la croissance ne sera pas au rendez-vous, mais ils performeront probablement mal dans presque tous les autres scénarios imaginables. Il est acceptable d'en détenir à des fins de contrôle de risque, mais nous continuons de recommander une petite pondération. En ce qui concerne les actions, nous sommes à l'aise avec la gamme actuelle de gestionnaires employés et le positionnement général. Notre répertoire est bien diversifié géographiquement, stylistiquement, du point de vue de la capitalisation boursière et de l’approche générale. En amorçant 2023, nous maintenons des inclinaisons mineures vers la valeur et la faible volatilité, bien qu'à un dosage plus faible qu'il y a un trimestre. En ce qui concerne les attentes de performance à court terme, nous n'avons aucune conviction forte dans un sens ou dans l'autre. Toutefois, nous notons que la majorité des stratèges et pronostiqueurs de Wall Street pensent que le S&P 500 augmentera de 4 % à 12 % au cours des 12 prochains mois. Compte tenu du niveau du taux directeur et de celui des primes de risque des actions, c’est fort possible. Néanmoins, puisque nous prévoyons un écart-type annualisé de 12 % pour la catégorie d'actifs, il serait plus prudent d'affirmer qu'il y aura environ deux tiers des chances que les indices d’actions reviennent entre -5 % et +20 %. Nous soulignons que le consensus actuel est que les bénéfices du S&P 500 Index augmenteront de 4,4 % en 2023. On pourrait remettre cela en question si une récession avait lieu, car les bénéfices ont eu tendance à baisser de plus de 10 % lors des ralentissements économiques antérieurs. En ce qui concerne les alternatives liquides, notre fonds de fonds de couverture est l'un des rares points positifs en valeur absolue en 2022. Ce fonds a accueilli son huitième gestionnaire le 1er janvier 2023. Avec l’arrivée de ce dernier, nous étendons notre couverture. Nous sommes à l'aise de maintenir une légère surpondération compte tenu de sa capacité éprouvée à générer des rendements positifs lors de perturbations du marché et aussi en raison des avantages de diversification qu'il offre dans un contexte où, à notre avis, la probabilité d'une reprise conjointe des actions et des obligations est mince. Finalement, du côté des stratégies alternatives moins liquides, nous continuons de préconiser une approche qui vise l’atteinte et le maintien d’une cible de répartition au bout de plusieurs années suite à l’établissement d’un programme d’engagement. Comme chaque année, nous prévoyons proposer un éventail relativement restreint de fonds répartis au sein des principales catégories, soit le capital-actions des sociétés privées, le développement immobilier et l’infrastructure. Compte tenu de la hausse des taux, nous prévoyons porter une attention plus particulière à la dette privée avec une emphase distincte sur les stratégies ou secteurs où un déficit de capital se profile. Merci de votre support, Dimitri Douaire, M. Sc., CFA Chef des placements [1]La performance de l'indice est rapportée sur la base du rendement total en devise locale, à moins d’avis contraire. [2] Aux fins de cette discussion, je considère l'industrie de la blockchain et l'industrie de la cryptomonnaie comme distinctes. Mes commentaires concernent strictement l'industrie de la cryptomonnaie. [3] Une bourse de bitcoins basée au Japon qui aurait traité plus de 70 % des transactions en bitcoins au début de 2014. [4] William McCaskill, Doing Good Better: How Effective Altruism Can Help You Make a Difference, 2015. [5] Firmes de négociations pour compte propre. [6] Source: Opensecrets.org. [7] Avocat de la faillite qui a supervisé la liquidation et le recouvrement des actifs d’Enron et Fruit of the Loom. [8] https://patrimonica.com/le-grand-deconfinement, 30 juin 2020. [9] Source : Eli Lilly [10] Harvard School of Public Health [11] Source : Bank of America Securities [12] Notamment, Hans Bethe. Crédit photo

Pas si calme sur le front de l’est – réflexions sur la situation Russie-Ukraine

Montréal, le 25 février 2022 BRÈVE NOTE DU CHEF DES PLACEMENTS[1] Commençons cette note en mentionnant que nos pensées vont à tous les Ukrainiens dont la diaspora canadienne est la plus importante au monde après celle de la Russie.[2]  Nous prions pour une désescalade rapide de la situation. L’un de mes groupes de musique préférés en ce moment est un quatuor folklorique ukrainien nommé Dakha Brakha. Beaucoup de chansons de Dakha Brakha ont pour thème la réminiscence de ce qu’était la vie dans l’Ukraine pré-communiste. La raison pour laquelle je mentionne cela alors que certains médias occidentaux décrivent la situation qui se déroule dans la province orientale de Donetsk et Luhantsk comme quelque chose de totalement inattendu, il convient de noter que rien de cela n’est nouveau pour les Ukrainiens qui ont été indirectement contrôlés ou carrément réprimés par Moscou depuis des siècles. En fait, les régions qui subissent aujourd’hui des frappes militaires russes sont vivent sous le coup d’un état d’urgence décaré depuis 2014. Certes, je ne pensais pas que Moscou allait donner suite à ses menaces ouvertes, mais bien que cela se soit intensifié plus que je ne le pensais, je crois toujours que Moscou est prêt à ordonner un cessez-le-feu général et un retrait de ses troupes dès que l’OTAN aura accepté ses demandes. Moscou prétend que l’opération militaire était nécessaire pour protéger les civils dans l’est de l’Ukraine, mais je crois que c’est une excuse car, en même temps, Moscou a clairement indiqué, à plusieurs reprises, qu’elle voulait que l’OTAN promette de ne pas s’étendre à d’autres pays d’Europe de l’Est qui bordent la Russie[3]. Pour le contexte, la Russie partage déjà une frontière avec cinq membres de l’OTAN. L’OTAN, en revanche, refuse les demandes de Moscou en vertu du fait que tous les pays ont le droit à l’autodétermination. Dans cet esprit, je crois que les actions de Moscou au cours des dernières 48 heures visent à vérifier si la détermination de l’OTAN à protéger l’indépendance de l’Ukraine est aussi ferme que la détermination de Moscou à la mettre sous sa tutelle. Implicitement, les actions de Moscou indiquent également qu’elle est prête à ce que la population russe et les conglomérats internationaux russes subissent les contrecoups de sanctions internationales sévères, montrant ainsi que son gouvernement n’est pas contraint par l’opinion publique comme le sont les pays de l’OTAN. En fait, je crois que Moscou compte sur le fait que le public américain a peu d’appétit pour une autre campagne militaire étrangère car il a enfin compris à quel point il est coûteux et difficile d’aider les petits pays à maintenir leur indépendance vis-à-vis leurs voisins belligérants. L’Afghanistan, où les États-Unis n’ont pas réussi à établir un ordre politique ou une économie nationale fonctionnelle après deux décennies, n’est que le dernier exemple. Avant cela, il y eu la Corée du Sud (1948-50 - la Corée du Nord a envahi la Corée du Sud avec le soutien de la Chine et de l’Union soviétique) et le Vietnam (1955-75 - le Nord-Vietnam a envahi le Sud-Vietnam, le Laos et le Cambodge avec le soutien de la Chine et de l’Union soviétique). Pour résumer, je crois que Moscou a conclu que l’OTAN est peu disposée à s’engager dans une nouvelle guerre et que dans l’intrerim, tout ce que Moscou fait maximise les chances de maintenir Kiev sous son influence. IMPLICATIONS DE LA STRATÉGIE D’INVESTISSEMENT Si la variante omicron ou la perspective d’une inflation galopante étaient insuffisantes, il semble que l’invasion de l’Ukraine par la Russie ait finalement fourni l’excuse pour plonger les marchés de capitaux dans une chute importante. À ce stade, les pertes enregistrées sur marchés boursiers mondiaux depuis le début de l’année s’approchent de 10% et les indicateurs de volatilité sont à nouveau à la hausse. C’est le genre de scénario qui incite les investisseurs à remettre en question leur stratégie d’investissement. Cela étant dit, tout comme nous avons argumenté contre une réduction marquée de l’exposition aux actifs risqués lorsque les premiers cas de Covid-19 ont été révélés en dehors de la Chine sous prétexte qu’il était déjà trop tard, je crois que vendre maintenant, étant donné que tant de peur et d’incertitude sont escomptées, n’est pas la meilleure option. En même temps, je ne suggère pas d’acheter non plus. Après tout, bien que je ne pense pas que la situation en Ukraine se détériorera davantage, une attaque contre les gazoducs russes qui traversent l’Ukraine pour approvisionner l’Allemagne et d’autres parts d’Europe ne peut plus être exclue non plus. Je ne pense pas non plus que la Russie inspirera Beijing à envisager des options similaires pour Taïwan, mais c’est aussi une possibilité. Je voudrais simplement souligner que même si nos modèles suggèrent toujours que les grands marchés boursiers continueront de s’apprécier de 5 % à 7 % par année en moyenne en termes nominaux dans notre scénario de base, cela ne signifie pas qu’ils s’apprécieront de 5 % à 7 % chaque année. On nous rappelle périodiquement, comme c’est le cas actuellement, que les marchés ne progressent pas de manière constante. Il y aura des années à la baisse et il y aura des années de hausses majeures. Comme nous l’avons mentionné à de nombreuses reprises, la clé est de s’assurer que la proportion du capital d’un investisseur qui est investie dans des actifs risqués est conforme à la tolérance au risque ou aux pertes de ce dernier. À cet égard, je suis très à l’aise avec le positionnement que nous avons adopté pour nos clients. Par exemple, grâce aux gestionnaires que nous avons choisis, nous avons largement évité les obligations d’État à long terme qui s’avèrent très vulnérables aux hausses de taux d’intérêt. Nous avons également évité les segments les plus spéculatifs des marchés boursiers qui s’avèrent également vulnérables aux ajustements de la politique monétaire. Nous avons entièrement évité les saveurs populaires telles que les entreprises ayant récemment procéder à un premier appel public à l’épargne et n’avons jamais touché aux crypto-monnaies. Du côté des marchés privés, nous avons systématiquement refusé d’investir dans des entreprises de logiciels en démarrage sur des multiples jamais vus depuis la bulle technologique d’il y a 20 ans. Nous nous sommes plutôt concentré sur la mise en place d’un portefeuille de fonds de couverture dans lequel les fonds sous-jacents mise sur l’arbitrage de valeur relatives, une volatilité ou une dispersion plus élevée ou des stratégies suivant la tendance. Nous avons vu cela comme la meilleure stratégie pour éviter d’être pris au dépourvu dans le cas où les actions et les titres à revenu fixe déçus simultanément. Ensemble, ces petites actions ont contribué à améliorer la résilience des portefeuilles de nos clients. En dépit des événements récents, je demeure optimiste quant à la perspective de pouvoir apprécier Dakha Brakha en concert à Montréal dans un rapproché. Dimitri Douaire, M. Sc., CFA Chef des placements   [1] Le titre est une paraphrase de l'1930 film sur le thème de la Première Guerre mondiale “Tout calme sur le western front” basé sur le roman d’Erich Maria Remarque de 1929. [2] Profil du recensement, Recensement de 2016 : Population d’origine ethnique, Statistique Canada, le 8 février 2017 [3] Depuis l’effondrement de l’Union soviétique, la zone tampon occidentale de la Russie a été réduite à la Biélorussie   Crédit photo